Google ne conçoit plus ses produits avec de l’IA. Elle les conçoit pour l’IA.
La keynote annuelle Google I/O 2025, tenue le 20 mai, a marqué un tournant : l’intelligence artificielle n’est plus un outil en surcouche, mais un moteur central de l’expérience utilisateur. De Gemini à Android XR, en passant par Beam, la vision de Google est claire : déporter la complexité technologique pour ne garder que l’interaction fluide et proactive.
1. Gemini devient l’interface par défaut
Le modèle Gemini 2.5 Pro, intégrant LearnLM, s’impose comme la nouvelle colonne vertébrale de l’écosystème Google. Il est déployé dans Search, Workspace, Chrome, Android, et commence à remplacer Google Assistant sur TV, Auto et WearOS. Sa version Flash, plus rapide et moins coûteuse, permet une intégration massive.
Avec Gemini Live, les interactions deviennent multimodales : l’utilisateur parle à son IA, lui montre un objet ou partage son écran. L’IA voit, comprend, corrige, anticipe. Elle est déjà disponible sur Android et iOS.
Agent Mode permet à Gemini d’enchaîner jusqu’à 10 tâches complexes, en interaction avec le web. Cette logique d’agents intelligents s’inscrit dans un cadre ouvert avec l’ADK, un SDK en Python et Java, et un protocole A2A pour la collaboration entre IA.
2. La recherche se transforme en moteur d’action
Google Search n’est plus un champ de requête, mais un assistant décisionnel. AI Mode et Deep Search permettent de poser des questions complexes, d’obtenir des réponses personnalisées, multimodales, sourcées, et – surtout – de passer à l’action.
De la recherche de billets d’événements à leur achat via Agentic Checkout, en passant par la réservation de restaurants ou la planification d’activités, la frontière entre recherche, assistant personnel et interface disparaît.
Google annonce 1,5 milliard d’utilisateurs actifs mensuels d’AI Overviews. Le modèle n’est plus en test : il est déjà la norme pour une large partie du globe.
3. La création passe par la génération
Google réunit ses modèles génératifs dans une suite créative cohérente :
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Imagen 4 pour les images 2K avec texte fiable
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Veo 3 pour les vidéos avec son natif (bruitages, dialogues)
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Flow pour assembler des clips et produire un montage cohérent
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Stitch pour créer des interfaces desktop ou mobile à partir de prompts
Tout cela est accessible depuis Gemini, dans une logique de production centrée sur le prompt et la co-création. Les outils de Google Vids et Workspace s’enrichissent également de ces capacités.
4. L’IA sort de l’écran : Android XR, Beam et les lunettes
Android XR devient la plateforme d’un OS spatial : casques (Project Muhan), lunettes intelligentes (avec Gentle Monster, Warby Parker) et visio immersive (Google Beam, issu de Starline).
Les lunettes Gemini embarquent caméra, micros, écrans, et permettent une interaction vocale, visuelle et contextuelle avec l’IA. Elles anticipent les besoins, traduisent en temps réel, et proposent une UX dématérialisée, sans interface visible.
Google Beam permet, lui, des appels 3D ultra-réalistes, avec restitution des expressions, du ton de voix, et un fort impact sur l’attention et la mémorisation. Les premières unités (co-conçues avec HP) arrivent fin 2025.
5. Vers un nouveau cycle de conception numérique
Ce que Google propose n’est pas une IA de plus. C’est une réorganisation complète de la chaîne de valeur :
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Les produits ne visent plus directement l’utilisateur, mais parfois son assistant IA
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Le contenu n’est plus destiné à être lu, mais compris, digéré, résumé, réutilisé
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L’interface n’est plus visuelle mais contextuelle, conversationnelle et proactive
C’est un point de bascule pour les designers, les développeurs, les stratèges produits.
Google ne rajoute pas de l’IA dans ses produits. Elle conçoit des produits autour de l’IA.
Un nouveau terrain de jeu s’ouvre. À nous de comprendre comment y jouer.